Editorial

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Ce numéro consacré aux pratiques de consommations des personnes en situation de handicap s’est notamment construit suite à la première journée d’études interdisciplinaires « handicap et consommation » organisée le 8 mars 2019 à Nancy[1]. Ces rencontres qui réunissaient des chercheurs en gestion, information et communication, STAPS et sociologie ont été riches en échanges et ont permis de faire émerger des perspectives théoriques et méthodologiques variées dont ce numéro rend compte.

Les différents articles et essais de ce numéro soulignent en effet la multiplicité des expériences et des pratiques de consommation des « personnes en situation de handicap », notion large qui recouvre des situations et des formes de handicap très variées toujours difficiles à circonscrire. L’autre point commun partagé par les contributions est de porter une réflexion sur la capacité d’empowerment des acteurs, de leur capacité, malgré les difficultés auxquelles ils doivent faire face, de créativité et d’inventivité pour trouver des espaces d’autonomisation. Par exemple dans leur essai, Dominique et Cyril Desjeux montrent ainsi l’intérêt de l’observation, et plus largement d’une approche qualitative, pour comprendre les modalités de l’autonomie des acteurs. De façon analogue, la contribution née de la rencontre entre Coralie Lallemand, doctorante en marketing travaillant sur le genre, et le collectif « les Dévalideuses » montre la façon dont la capacité d’empowerment des femmes en situation de handicap est doublement entravée par leur genre et leur handicap. La capacité à se lier à d’autres, à faire communauté pour porter sa parole, apparaît alors comme une ressource importante.

La capacité d’agir et l’autonomie occupe également une place importante dans la contribution de Myriam Wynance. En adoptant une approche issue de la sociologie des sciences et des techniques, elle s’intéresse à la nature de la relation qui lie la personne handicapée à son fauteuil et montre la façon dont la relation au fauteuil peut conduire certaines personnes à se sentir autonomes ou, au contraire, handicapées. C’est sous l’angle temporel et en s’intéressant à un service de gériatrie que Margaret Josion-Portail, Abdelmajid Amine, et Audrey Bonnemaizon abordent la consommation des personnes en situation de handicap. Ils montrent au travers de leur contribution la façon dont des décalages entre les temporalités des soignants et des personnes âgées suscitent des tensions. En ce sens, la participation et l’empowerment des usagers impliquent une resynchronisation du temps de l’organisation avec celui de ses patients.

[1] L’ensemble de la journée a fait l’objet d’une captation et peut être regardée à l’adresse suivante : https://videos.univ-lorraine.fr/index.php?act=view&id_col=546

A propos de Jean-Philippe Nau

Jean-Philippe Nau est maître de conférences en science de gestion à l’Université de Lorraine (IAE de Nancy / CEREFIGE). Ses recherches portent sur les questions d’inclusion et d’exclusion liées à la consommation. Il a notamment travaillé sur la consommation des personnes en situation de handicap, sur le jeu vidéo et le téléchargement illégal. Il est membre du Réseau Thématique 11 « Sociologie de la consommation et du numérique » de l’Association Française de Sociologie, co-responsable du Groupement d’Intérêt Thématique « ALternative COnsumption Research (ALCOR) » de l’Association Française de Marketing et cofondateur du réseau mixte de recherche « Handicap et Innovation, Inclusive » (H2I).

A propos de Renaud Garcia-Bardidia

Renaud Garcia-Bardidia est professeur de sciences de gestion à l’université de Rouen. Ses travaux s'intéressent aux formes que prend la consommation quand elle est également production, en particulier au travers des usages d'internet. Ses principaux thèmes de recherche sont : les évolutions de la consommation culturelle dans le cadre de sa numérimorphose, les formes spécifiques de socialisation par la consommation, ou encore les ressorts de la construction sociale du goût.